CCB/VP
17.11.10
Bâtonnier Jérôme HERCÉ
Le jeune avocat que je vis arriver à mon cabinet, rue de Logelbach, en 1984, voici vingt-six ans, me surprit par son air grave et son regard à la fois clair et profond. Il donnait l’impression de regarder au-delà de son interlocuteur. J’appris plus tard qu’il était marin et qu’il était donc habitué à scruter très loin l’horizon de la mer. Cela lui donnait une présence très singulière d’autant qu’il ne parlait pas. Non qu’il en fut incapable : la suite l’a prouvé ; mais il semblait nourrir à l’égard des mots une sorte de réserve. C’était sa manière de ne pas exposer imprudemment sa pensée, exactement comme, sur son bateau, il préservait sa voile d’une trop grande prise au vent. J’ai très vite compris qu’il n’était ni introverti, ni timide, mais pudique et prudent, non pas la prudence des lâches ou des précautionneux, mais celle des sages. Je fus particulièrement impressionné d’apprendre qu’il avait traversé l’Océan atlantique sur un voilier alors qu’il n’était encore qu’un tout jeune homme.
Il savait aussi bien endurer les accidents de mon caractère que donner de la voix quand il jugeait qu’il était temps de couvrir la mienne. Je garde un souvenir particulièrement heureux de ces années où j’ai pu apprécier sa compétence, sa loyauté, son dévouement et son talent : il est tout naturellement devenu secrétaire de la Conférence et tout naturellement bâtonnier, avec ce clin d’œil particulier du destin qui nous a fait accomplir ce service au même moment en 2009, lui à Rouen et moi à Paris. Puisse la vie continuer à lui sourire et son regard demeurer aussi clair comme l’est son cœur « qui dans la mer se trempe ».
Je lui souhaite tout le bonheur d’un après-bâtonnat rayonnant.
Paris, le 17 novembre 2010
Christian Charrière-Bournazel