LA « LOI GAYSSOT » DOUZE ANS D’APPLICATION PRATIQUE JUDICIAIRE DE L’AVOCAT

CCB/VP/MC

03.07.02

LA « LOI GAYSSOT »

DOUZE ANS D’APPLICATION

PRATIQUE JUDICIAIRE DE L’AVOCAT

La « loi Gayssot » a douze ans.

Vivement critiquée par les uns, estimée nécessaire par les autres, elle a pris place dans l’appareil juridique que constitue la loi du 29 juillet 1881 sur la presse dont il faut rappeler qu’elle est d’abord la garante de la liberté d’expression.

Comme droit fondamental de la personne humaine, la liberté d’expression est garantie par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 inscrite au préambule de la Constitution, par la Déclaration universelle des droits de l’homme, par la Déclaration européenne des droits de l’homme puis réaffirmée encore dans la Charte européenne des droits de l’homme.

Comme il n’existe pas de liberté absolue, il est partout rappelé que chacun peut en jouir sauf à répondre des abus de cette liberté.

La « loi Gayssot » réprime, après d’autres textes, un abus particulier de la liberté d’expression.

L’application de la « loi Gayssot » s’inscrit d’abord dans le cadre légal rigoureux de la loi de 1881 (I) et impose une analyse méthodique des propos en cause à raison même du caractère très spécifique de ce délit (II).

I – LES CONTRAINTES DE LA LOI

Elles sont de trois ordres :

– la définition, très précise, du délit de contestation ;

– les contraintes procédurales ;

– la qualité pour agir comme partie civile.

A – LA DÉFINITION LÉGALE DU DÉLIT

L’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 tel que l’a créé la loi du 13 juillet 1990 dite « loi Gayssot », institue en délits la contestation d’un ou plusieurs crimes contre l’humanité tels que les a définis l’article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis par les membres d’une organisation déclarée criminelle en application de l’article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale.

Pour être répréhensible, cette contestation doit avoir été faite par les moyens énoncés à l’article 23 de la loi sur la presse, c’est-à-dire par tous les moyens d’expression oraux ou écrits à la condition qu’ils aient été publics.

L’élément matériel du délit comporte donc les éléments suivants :

1) la contestation de crimes et délits définis par l’article 6 du statut du tribunal militaire international de Nuremberg,

qu’ils aient été condamnés par le tribunal lui-même ou commis par une personne condamnée pour ces crimes-là par une juridiction française ou internationale ;

2) un élément de publicité.

Toutes les décisions de jurisprudence intervenues depuis le mois d’octobre 1990 ont estimé le délit constitué dans les circonstances suivantes :

– négation des chambres à gaz,

– négation de la politique d’extermination des Juifs par le troisième Reich,

– reprise, sous prétexte de travaux d’histoire, d’allégations manifestement erronées ou délibérément fautives,

– l’exposé prétendument scientifique de ce que la méthode du gazage par production d’acide cyanhydrique serait invraisemblable,

– la banalisation des crimes nazis ou leur péjoration,

– la disqualification des institutions et des témoignages concernant le sujet,

– la contestation du sens des mots (Affaire Garaudy),

– l’apologie d’Hitler ou du régime nazi, qui figure une négation par antiphrase.

Quantité de formules employées par les auteurs condamnés ont été sanctionnées par les tribunaux comme celle selon laquelle l’extermination des Juifs par les chambres à gaz relèverait du domaine de la « croyance », ou que cette vérité serait « de nature de moins en moins scientifique », ou encore qu’elle relèverait du « mythe ».

A été également sanctionnée comme telle l’affirmation par quelqu’un de ce qu’il est révisionniste « ou négationniste » au sens de la contestation prévue et réprimée par l’article 24 bis.

La consistance du délit est donc aujourd’hui très précisément définie.

L’interprétation jurisprudentielle est une interprétation a minima qui n’a jamais été étendue à d’autres formes de négationnisme comme, par exemple, celui du génocide arménien qui n’entre pas dans les prévisions de l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881.

B – LES CONTRAINTES DE LA PROCÉDURE

L’action est soumise à toutes les obligations procédurales découlant de la loi du 29 juillet 1881 :

– la preuve de la publicité,

– la courte prescription de trois mois,

– les exigences formelles de rédaction de la citation et de délai imposées par les articles 53 et 54 (l’allongement du délai de distance).

Comme tous les textes de droit pénal, la « loi Gayssot » n’est pas rétroactive. Dans son arrêt du 15 juin 1993, la Chambre criminelle de la cour de cassation a cassé un arrêt de la cour d’appel de Caen du 10 avril 1992 qui avait estimé pouvoir condamner Vincent Reynouard et Rémy Pontier dont l’écrit avait été édité et distribué avant la loi du 13 juillet 1990, au motif qu’il avait aussi été distribué après cette date.

En revanche, la 1ère chambre A de la cour d’appel de Paris avait, le 31 octobre 1990, estimé devoir infirmer un jugement du tribunal et débouter Monsieur Guillaume de sa demande tendant à la mainlevée d’une mesure d’interdiction provisoire prononcée en référé. En l’occurrence, il s’agissait d’une décision civile qui se fondait sur le fait que la diffusion comme la distribution de la revue de Monsieur Guillaume, indépendamment même de sa mise en vente ou de son exposition dans des lieux ou réunions publics, étaient constitutives par elle-même d’un trouble illicite de nature à porter atteinte à l’ordre public tel qu’il est défini « par les nouvelles dispositions de la loi du 13 juillet 1990 ».

La cour avait mis en avant le caractère de loi de police et de sûreté de cette nouvelle disposition, de sorte que, la mesure d’interdiction se justifiait, sans avoir à se poser la question de la rétroactivité de la loi pénale.

Aujourd’hui, après douze ans de pratique judiciaire, sont clairement définis à la fois la consistance du délit et le fait que c’est un délit de presse relevant, à ce titre, des dispositions de la loi de 1881.

C – QUI PEUT AGIR ?

Le parquet bien sûr.

Mais aussi selon l’article 48-2 « toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer des droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’infraction prévue par l’article 24 bis ».

C’est ainsi que la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) fait débouter par la 11ème chambre de la cour d’appel de Paris, le 16 mars 1994, au motif qu’elle n’avait pas inclus dans ses statuts à l’époque des faits le combat contre la contestation des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, de sorte qu’elle était irrecevable à se porter partie civile pour ce délit en raison de la définition stricte donnée par l’article 48-2.

Depuis, cette association a modifié ses statuts en conséquence.

La question s’est posée cependant pendant cinq années de savoir si ce qui comptait était l’ancienneté de l’association (la LICRA en a soixante quinze) ou s’il fallait attendre cinq ans à compter de l’adjonction à l’objet social de la disposition nécessaire pour être admis à agir en justice.

Dans le même temps, la question n’avait pas fait obstacle à l’arrêt au civil rendu par la cour d’appel le 31 octobre 1990 dans l’affaire Guillaume portant sur l’interdiction de la diffusion de l’ouvrage de Monsieur Guillaume.

Toutes ces questions sont aujourd’hui purgées.

Les associations de déportés et résistants dès l’origine ont été les plus actives.

Elles ont été très vite secondées par les associations qui ont pour objet la lutte contre toutes formes de racisme, de xénophobie, d’antisémitisme et de discrimination qui ont, depuis 1990, adapté leurs statuts afin d’être recevables à agir.

*

*        *

Conclusion :

Constituent donc des délits réprimés par la loi les propos publics, dont la teneur vise à la contestation sous toute forme des crimes contre l’humanité tels que punis par le jugement de Nuremberg.

Les règles de procédure sont exactement celles applicables à tous les délits de presse. La question est aujourd’hui en technique pure parfaitement circonscrite.

Demeure le débat entre l’apparente contradiction entre la « loi Gayssot » et la liberté d’expression.

 

II – LE DÉBAT DE FOND SUR LA « LOI GAYSSOT » ET LA PRATIQUE JUDICIAIRE

Les critiques contre la « loi Gayssot » n’ont pas été simplement exprimées à l’occasion d’échanges entre juristes et philosophes. Le débat oppose les tenants d’une sorte d’intégrisme de la liberté d’expression d’une part et ceux qui considèrent que cette liberté ne saurait servir de pavillon de complaisance pour écouler n’importe quelle marchandise.

Ce débat s’est d’abord instauré devant les tribunaux autour d’un certain nombre de moyens juridiques dont on peut rapidement dresser l’inventaire (A).

Reste le problème philosophique de fond et les limites d’une loi. Avant que s’échangent demain des avis sur son extension, son maintien tel quel ou sa suppression, j’évoquerai les questions auxquelles doit répondre l’association qui se propose d’agir (B).

A – LES MOYENS DE DÉFENSE DES PERSONNES POURSUIVIES

Ils sont essentiellement de trois ordres :

– l’inconstitutionnalité de la loi,

– le défaut de publication au Journal officiel du jugement de Nuremberg,

– la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme en son article 10.

1) l’inconstitutionnalité de la loi

Dès le 21 mai 1992, la cour d’appel de Paris (11ème chambre – section B) a estimé qu’il n’appartient pas au juge judiciaire d’examiner la conformité d’une loi par rapport à la Constitution.

Le 20 décembre 1994, la cour de cassation a rendu un arrêt sur ce même moyen.

Le demandeur au pourvoi soutenait qu’en donnant force de loi au contenu de certaines décisions de justice (en l’occurrence le jugement de Nuremberg), l’article 24 bis de la loi avait violé le principe de séparation des pouvoirs législatif et judiciaire, et ce au motif que le législateur ne saurait fonder une incrimination sur la reconnaissance, par une décision de justice déterminée, de la culpabilité personnelle d’un tiers.

Le demandeur au pourvoi opposait le rôle du législateur, dont la fonction est de fixer le droit en édictant des règles générales, à celui du juge qui, lui, détermine les faits, les considère comme établis à l’occasion d’une espèce, sans porter atteinte à l’indépendance et à l’impartialité de l’autorité judiciaire.

De la sorte, toujours selon le demandeur au pourvoi, la loi aurait privé les juges de leur pouvoir d’appréciation des faits en les contraignant à sanctionner la contestation du crime contre l’humanité, de sorte que la loi serait anticonstitutionnelle.

La Cour de cassation, dans un attendu extrêmement sec, a repris la décision de la cour d’appel du 21 mai 1992 :

« Les textes ayant valeur législative s’imposent aux juridictions de l’ordre judiciaire qui ne sont pas juges de leur constitutionnalité. »

Cela n’a pas empêché, en 1996, un plaideur de soulever ce qu’il a appelé une « exception de tyrannie » en soutenant que l’article 24 bis constituerait non pas une loi mais une « voie de fait législative ».

Il avait repris le même moyen selon lequel l’article de loi aurait privé le juge de son indépendance et de son impartialité.

Le jugement de la 17ème chambre a très clairement repris le motif énoncé par la Cour suprême en 1994 tout en précisant que le législateur n’a commis aucune « voie de fait législative », « puisque le juge garde son entier pouvoir d’analyser les faits poursuivis et d’apprécier, dans chaque espèce, en toute indépendance et impartialité, si les éléments constitutifs du délit sont réunis. »

Ce premier moyen n’a donc plus aucune portée.

2) Le défaut de publication du jugement de Nuremberg.

La cour d’appel de Paris, dans son arrêt précité du 21 mai 1992 (11ème chambre – section B), avait eu à se prononcer déjà sur ce second moyen consistant à soutenir que le jugement de Nuremberg serait inopposable au motif qu’il n’aurait pas été publié au Journal officiel.

La cour avait relevé que la publication ne concerne que les lois et règlements et non les décisions de justice.

Dans une autre espèce, la chambre criminelle, le 23 février 1993, a rendu un arrêt sur ce même moyen.

Le demandeur au pourvoi soutenait qu’avait été violé le décret du 5 novembre 1870 en raison du défaut de publication au Journal officiel de la République française du jugement du tribunal militaire international de Nuremberg du 1er octobre 1946.

La cour suprême a d’abord relevé que l’accord de Londres du 8 mai 1945 avec son annexe portant statut du Tribunal militaire international, avait été régulièrement publié au Journal officiel du 7 octobre 1945.

Elle avait encore relevé que l’article 26 de ce statut disposait que la décision « sera définitive et non susceptible de révision ».

Les magistrats de la cour suprême en ont déduit que l’ « autorité de chose jugée d’une décision de justice procède de son caractère définitif, indépendamment de toute publication et que le décret du 5 novembre 1870 est inapplicable aux décisions de justice ».

L’affaire est donc depuis cette date définitivement entendue.

3) La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme

Là encore, c’est l’arrêt de la cour d’appel de Paris (11ème chambre – section B) qui, dès le 21 mai 1992, a dit le droit la première.

Le prévenu avait soulevé la contradiction entre l’article 24 bis et l’article 1 de la loi du 29 juillet 1881 qui pose le principe de la liberté de la presse.

La cour avait relevé que cet article ne pouvait prévaloir sur les autres articles de la loi et notamment pas sur l’article 24 bis.

S’appuyant sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, et plus précisément sur son article 10, le prévenu demandait que soit écartée l’application de l’article 24 bis.

La cour lui a répondu que la Convention européenne des droits de l’homme laisse aux États le soin de prendre les mesures restrictives à la liberté d’expression en cas de menace à l’ordre public.

C’est le 23 février 1993, que la Cour de cassation s’est prononcée sur ce moyen tiré de la violation des articles 6, 8, 10 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Elle a estimé que dès lors que l’article 2 de la Convention prévoyait certaines exceptions à la liberté d’expression, et que l’incrimination de l’article 24 bis, comme les autres articles de la loi sur la presse, sanctionnent des comportements attentatoires à l’ordre public et aux droits des individus, ces dispositions n’excèdent pas les limites fixées par le second alinéa de l’article 10 précité.

Là encore, le moyen a fait long feu et ce point est définitivement jugé.

Pour autant, le débat n’est pas clos et se pose un certain nombre de questions au praticien qui doit agir.

B – LE DÉBAT DE FOND ET L’OPPORTUNITÉ DE L’ACTION

Les associations de défense des droits de la personne humaine sont plus que toutes autres attachées au plein exercice par chacun des libertés fondamentales.

Le jeu des adversaires auxquels elles doivent se confronter consiste à les présenter comme des censeurs et à inverser les rôles comme si l’auteur du délit était une victime. A ce jeu de miroirs pervers, l’association qui demande protection à la justice pour ceux et celles aux droits desquels elle veille, se trouve travestie en persécutrice. Il y a là une dialectique du mensonge qui constitue d’ailleurs le ressort du négationnisme.

Mais le mensonge n’est pas affirmé pour lui-même. Il est le masque d’un poison millénaire et depuis longtemps identifié : l’antisémitisme.

Pour remplir le mieux possible leur rôle pédagogique, les procès que font les associations sont soigneusement choisis.

Quelques réflexions sur ces points.

 

1) Le sophisme d’une liberté sans limite

En marge des jurisprudences que nous venons de commenter, qu’il me soit permis de développer quelques idées.

Aucune liberté n’est absolue. Chaque liberté est concurrente, voire opposée à une autre ou bornée par un droit : droit à l’honneur, à la considération, au respect de la vie privée, à la présomption d’innocence, au respect de son intégrité physique, de sa différence sexuelle, de son appartenance religieuse, etc …

Bref, il y a une utopie meurtrière dans la défense absolue d’une liberté d’expression sans limite et sans sanction. C’est une illusion de considérer que les mots, parce qu’ils sont aussi le véhicule de la pensée, confèreraient un caractère sacré ou une immunité absolue à n’importe quelle assertion.

Si l’on pousse jusqu’à ces conséquences absurdes cette revendication libertaire, alors il faut supprimer du code pénal tous les délits qui ont pourtant pour support les mots : l’outrage à magistrat, le harcèlement sexuel ou moral, le chantage ou l’escroquerie, l’incitation des mineurs à la débauche, etc …

Cette déraison est aussi destructrice que l’était naguère le slogan : « Il est interdit d’interdire ».

Nier qu’il s’attache aux mots que l’on dit des effets terribles qui peuvent aller jusqu’à la destruction ou la mort et refuser que les catégories pénales définissent non des paroles interdites, mais des perversions mortelles de la vérité, ne relève pas de ce je ne sais quelle volonté de censure mais, au contraire, du souci humble et constant que l’on doit avoir pour ceux qui peuvent en souffrir jusqu’à en périr.

 

2) Le négationnisme procède de l’antisémitisme

Les adversaires de la « loi Gayssot » ne se bornent pas à invoquer l’atteinte insupportable à leur liberté d’expression.

Ils prétendent que la loi serait scélérate au prétexte qu’elle ne viserait qu’à protéger comme seuls dignes d’égards, les victimes de la Shoah.

Dans le même temps, selon eux, la loi ne se préoccupe ni des victimes du génocide arménien, ni des victimes du génocide cambodgien, ni des victimes du génocide biafrais ou rwandais.

C’est un sophisme.

Toutes victimes d’un génocide, quel qu’il soit, méritent la plus extrême compassion.

La particularité du négationnisme au sens de l’article 24 bis, c’est que sa démarche ne procède pas d’un travail d’historien cherchant à actualiser, à approfondir, à établir plus précisément la vérité historique (et en ce sens, tout historien est un révisionniste légitime). Il est inspiré par la volonté, sous prétexte de recherches scientifiques et d’histoire, de nier à tout prix l’extermination nazie, et ce à une double fin.

La première consiste à étouffer une compassion, jugée imméritée, à l’égard des victimes juives de la deuxième guerre mondiale.

La seconde, évidente, cherche à imposer l’idée que les Juifs montant en épingle des malheurs imaginaires, chercheraient à en tirer profit, financièrement, moralement et politiquement. Jouant de la culpabilité des nations occidentales, entretenue à force de mensonges, ils auraient acquis d’avoir les mains libres pour persécuter, à travers Israël, d’autres peuples, tout en battant monnaie grâce aux indemnisations qu’ils réclament.

Le résumé de cette thèse éclate dans le titre et dans le livre de Roger Garaudy « condamnés par la justice » : Les mythes fondateurs de la politique israélienne.

Quoi, en effet, peut être plus odieux qu’un imposteur qui prétend tirer avantage, dans l’injustice la plus totale, de malheurs qu’il n’a pas subis ?

Voilà l’un des visages nouveaux de la peste brune que la « loi Gayssot » a entendu combattre.

C – LE RÔLE DES ASSOCIATIONS

Les associations, à qui la loi a donné pouvoir d’agir en justice, opèrent une double démarche lorsqu’elles décident de poursuivre :

– l’analyse la plus serrée possible des textes en question. Cette analyse porte sur leur contenu sans oublier, quand elle est connue ou discernable, la personnalité de celui de qui ils émanent.

Beaucoup de procès ne sont pas intentés et donnent seulement lieu à des réponses, des lettres de protestation, des invitations pressantes à modifier un texte ambigu auprès de tel ou tel qui n’était pas nécessairement dans la mouvance d’une pensée haineuse et antisémite.

– lorsque le procès est décidé, collégialement, au sein de l’association qui a eu à débattre, la deuxième démarche est celle d’une pédagogie à l’égard du public à qui il ne faut jamais craindre d’expliquer et d’expliquer encore qu’il n’y a pas de pensée interdite, ni de travail historique proscrit, ni d’opinion tombant sous le coup de la loi ; mais qu’en revanche, doivent être combattus les écrits ou les propos qui procèdent de la haine de l’autre et de la volonté de la réduire et non pas de la pensée.

Inlassablement, les associations témoignent. Et les juridictions, appliquant la loi, valident ce témoignage porté au nom des droits de la personne humaine.

CONCLUSION

La table ronde qui s’ouvrira cet après-midi portera précisément sur le point de savoir s’il faut étendre le champ d’application de la loi à la contestation d’autres génocides.

Le bilan des douze premières années d’application de cette loi qui n’a abouti qu’à quelques dizaines de jugements et d’arrêts, est, à l’évidence, positif.

Si on les met en perspective et que l’on considère les propos qui ont été sanctionnés par les juridictions, la critique de ceux qui hurlent à la censure apparaît dérisoire : qu’on en juge : Faurisson dans Rivarol :

« Les chambres à gaz en voie de disparition ? » : « on peut relever bien d’autres silences sur certaines réalités d’Auschwitz et de Birkenau, des réalités qui prouvent que ces camps n’étaient pas “des camps d’extermination” malgré les ravages exercés par les épidémies de typhus ».

– Le dessin de Chard dans Rivarol sous le titre La libération de Buchenwald

On voit un soldat US qui interpelle cinq déportés en ces termes : « Où sont les chambres à gaz ? ». Les déportés indiquent quatre directions différentes.

– Jean-Marie Le Pen : « J’ai dit et j’ai redit, au risque d’être sacrilège, que les chambres à gaz sont un point de détail de l’histoire ».

– Roger Garaudy : Les mythes fondateurs de la politique israélienne – « le mythe des 6 millions » « le mot génocide a été employé à Nuremberg de manière tout à fait erronée puisqu’il ne s’agit pas de l’anéantissement de tout un peuple comme ce fut le cas pour les exterminations sacrées des Amalécites, des Cananéens. »

On pourrait facilement allonger ce florilège.

Pour autant les mêmes forcenés de la contestation continuent à écrire et à haïr. Les avocats des associations continuent inlassablement à témoigner et se donnent parfois l’impression d’être de malheureux éboueurs sur la tête de qui se viderait en permanence la benne à ordures qu’ils viennent de remplir. Peu importe, ils témoignent. Ils témoigneront jusqu’à la fin pour la mémoire des martyrs, pour le respect dû à la vérité et dans l’espoir invincible, même s’il est parfois illusoire de faire échec à la haine.

Paris, le 3 juillet 2002

Christian Charrière-Bournazel

Avocat au barreau de Paris